Durant la
guerre de Cent Ans, la plupart des régions du nord et sud-ouest du territoire français sont contrôlées depuis 1420 par les Anglais.
Le roi
Charles VI, dit
Charles le Fol, ne dispose pas de toutes ses facultés mentales. La légitimité de son dernier fils survivant, le
dauphin Charles, héritier de la couronne, est contestée, du fait des aventures qu'aurait eues
Isabeau de Bavière, sa mère (en particulier avec
Louis d'Orléans).
Depuis l'
assassinat de Louis d'Orléans en novembre
1407, le pays est déchiré par une
guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons. Ceux-ci se disputent le pouvoir au sein du conseil de régence présidé par la reine Isabeau du fait de la folie de son époux. Profitant de ce conflit
Henri V, roi d'Angleterre relance les hostilités et débarque en
Normandie en
1415. La
chevalerie française subit un désastre à
Azincourt, face aux
archers Gallois. En effet, les Anglais, ayant une maîtrise parfaite du tir à l'
arc long (
longbow) et, bien abrités des charges par des pieux disposés à l'avance, déciment sous une pluie de flèches la chevalerie française dont les chevaux ne sont pas encore protégés. Ils vont ainsi devenir maîtres des batailles à terrain découvert malgré leur nette infériorité numérique, jusqu'à ce qu'apparaisse l'artillerie de campagne qui donnera l'avantage aux Français en fin de conflit.
Lors de l'
entrevue de Montereau le
10 septembre 1419, le dauphin Charles et
Jean sans Peur doivent se réconcilier, pour faire face à l'ennemi. Mais malheureusement, au cours de cette rencontre, Jean sans Peur est poignardé par un homme du dauphin, probablement
Tanneguy du Chastel. En réaction à cet assassinat, le fils de Jean sans Peur,
Philippe le Bon, se rallie aux Anglais imité en cela par la puissante
Université de Paris.
Alliés au puissant duc de Bourgogne, les Anglais peuvent imposer en
1420 le
Traité de Troyes, qui est signé entre le roi
Henri V d'Angleterre et
Isabeau de Bavière, reine de France et régente. Selon les termes de ce traité, Henri V se marie à
Catherine, fille de Charles VI ; à la mort de Charles VI, la couronne doit revenir à leur descendance, réunissant les deux royaumes.
Ce traité qui spolie le dauphin de son droit de succession (car enfant illégitime et assassin présumé du duc de Bourgogne) est contesté par la
noblesse française. À la mort de Charles VI en
1422, la France n'a donc plus de roi ayant été sacré. La couronne de France est alors revendiquée par le roi d'Angleterre encore mineur,
Henri VI qui vient de succéder à son père.
À 13 ans, Jeanne affirme avoir entendu les voix célestes des saintes
Catherine et
Marguerite et de l'
archange saint Michel lui demandant d'être pieuse, de libérer le royaume de France de l'envahisseur et de conduire le dauphin sur le trône. Après beaucoup d'hésitations, à 16 ans, elle se met en route. Arrivée à la ville voisine, elle demande à s'enrôler dans les troupes du dauphin. Sa demande est rejetée deux fois, mais elle revient un an plus tard et
Robert de Baudricourt,
capitaine de
Vaucouleurs, accepte de lui donner une escorte, résigné face à la ferveur populaire de la ville où Jeanne avait acquis une petite notoriété, notamment en allant rendre visite au duc malade
Charles II de Lorraine. Avant son départ pour le royaume de France, Jeanne ira se recueillir à la
basilique de Saint-Nicolas-de-Port, dédiée au saint patron du
duché de Lorraine.
Portant des habits masculins (ce qu'elle fera jusqu'à sa mort, excepté pour sa dernière fête de Pâques), elle traverse incognito les terres bourguignonnes et elle se rend à
Chinon où elle est finalement autorisée à voir le dauphin Charles, après réception d'une lettre de Baudricourt. L'anecdote raconte qu'elle fut capable de reconnaître Charles, vêtu simplement au milieu de ses courtisans, et lui parle de sa mission. Par superstition, Jeanne est logée dans la tour du Coudray, celle où
Jacques de Molay fut emprisonné et aurait prononcé sa célèbre malédiction. Jeanne annonce clairement quatre événements : la libération d'
Orléans, le
sacre du roi à
Reims, la libération de
Paris et la libération du duc d'Orléans. Après l'avoir fait interroger par les autorités ecclésiastiques à
Poitiers où des
matrones constatent sa virginité, et après avoir fait une enquête à
Domrémy, Charles donne son accord sur son plan de libération d'
Orléans assiégée par les Anglais. Jeanne commence une série de trois sommations destinées aux Anglais.
Ses frères la rejoignent. On l'équipe d'une armure et d'une bannière blanche frappée de la
fleur de lys, elle y inscrit
Jesus Maria, qui est aussi la devise des
ordres mendiants (les
dominicains et les
franciscains). En partance de
Blois pour
Orléans, Jeanne expulse ou marie les prostituées de l'armée de secours et fait précéder ses troupes d'ecclésiastiques. Arrivée à
Orléans le 29 avril, elle apporte le ravitaillement et y rencontre
Jean d'Orléans, dit « le Bâtard d'Orléans », futur comte de Dunois. Elle est accueillie avec enthousiasme par la population, mais les capitaines de guerre sont réservés. Avec sa
foi, sa confiance et son enthousiasme, elle parvient à insuffler aux soldats français désespérés une énergie nouvelle et à contraindre les Anglais à lever le siège de la ville dans la nuit du
7 au
8 mai 1429.
Après cette victoire, célébrée chaque année à Orléans ces deux jours, on la surnomme la « Pucelle d'Orléans ». Après le nettoyage de la vallée de la Loire grâce à la victoire de Patay (où Jeanne d'Arc ne prit pas part aux combats), le
18 juin 1429 remportée face aux Anglais, elle persuade le dauphin d'aller à
Reims se faire sacrer roi de France.Pour arriver à Reims, l'équipée doit traverser des villes sous domination bourguignonne qui n'ont pas de raison d'ouvrir leurs portes, et que personne n'a les moyens de contraindre militairement. Selon Dunois, le coup de bluff aux portes de Troyes entraîne la soumission de la ville mais aussi de
Châlons et Reims. Dès lors, la traversée est possible.
Le
17 juillet 1429, dans la cathédrale de
Reims, en la présence de Jeanne d'Arc,
Charles VII est sacré par l'archevêque
Renault de Chartres. Le duc de Bourgogne, en tant que pair du royaume, est absent, Jeanne lui envoie une lettre le jour même du sacre pour lui demander la paix. L'effet politique et psychologique de ce sacre est majeur. Reims étant au cœur du territoire contrôlé par les
Bourguignons et hautement symbolique, il est interprété par beaucoup à l'époque comme le résultat d'une volonté divine. Il légitime Charles VII qui était déshérité par le
traité de Troyes et soupçonné d'être en réalité le fils illégitime du
Duc d'Orléans et Isabelle de Bavière.
Cette partie de la vie de Jeanne d'Arc constitue communément son épopée : ces événements qui fourmillent d'anecdotes où les contemporains voient régulièrement des petits miracles, le tout conforté par leurs références explicites dans les procès, ont grandement contribué à forger la légende et l'histoire officielle de Jeanne d'Arc. La découverte miraculeuse de l'épée dite de «
Charles Martel » sous l'autel de
Sainte-Catherine-de-Fierbois, en est un exemple.
Dans la foulée, Jeanne d'Arc tente de convaincre le roi de reprendre
Paris aux
Bourguignons, mais il hésite. Une attaque est menée par Jeanne sur
Paris (
Porte St-Honoré), mais doit être rapidement abandonnée. Le Roi finit par interdire tout nouvel assaut : l'argent et les vivres manquent et la discorde règne au sein de son conseil. C'est une retraite forcée vers la Loire, l'armée est dissoute.
Jeanne repart néanmoins en campagne : désormais elle conduit sa propre troupe et donc rien ne la distingue des chefs de guerres indépendants, elle ne représente plus le roi. Ses troupes lutteront contre des capitaines locaux, mais sans beaucoup de succès. Le 4 novembre 1429,
la Pucelle et Charles d'Albret s'emparent de
Saint-Pierre-le-Moûtier. Le 23 novembre, ils mettent le siège devant
La Charité-sur-Loire pour en chasser Perrinet Gressart. Pour Noël, Jeanne a regagné
Jargeau suite à l'échec du siège
.
Jeanne est alors conviée à rester dans le château de la Trémouille à
Sully-sur-Loire. Elle s'échappera rapidement de sa prison dorée, pour répondre à l'appel à l'aide de
Compiègne, assiégée par les Bourguignons. Finalement, elle est capturée lors d'une sortie aux portes de Compiègne le
23 mai 1430. Elle essaie de s'échapper par deux fois, mais échoue. Elle se blessera même sérieusement en sautant par une fenêtre. Elle est rachetée par les
Anglais pour 10 000 livres et confiée à
Pierre Cauchon, évêque de
Beauvais et allié des Anglais.
Lors de son procès qui dura du 21 février au
23 mai 1431, elle est accusée d'
hérésie et interrogée sans ménagement à
Rouen. Elle est emprisonnée dans le donjon du château de
Philippe Auguste ; seule une tour de la construction est parvenue jusqu'à nous et appelée maintenant
Tour Jeanne d'Arc. Le procès débute le
21 février 1431. Jugée par l'Église, elle reste néanmoins emprisonnée dans les prisons anglaises, au mépris du
droit canon.Si ses conditions d'emprisonnement sont particulièrement difficiles, Jeanne n'a néanmoins pas été soumise à la question pour avouer, c'est-à-dire à la
torture. Or à l'époque, la torture était une étape nécessaire à un « bon procès ». Cette surprenante absence de torture a servi d'argument pour une origine « noble » de Jeanne d'Arc. Les bourreaux n'auraient pas osé porter la main sur elle
[6].
« Sur l'amour ou la haine que Dieu porte aux Anglais, je n'en sais rien, mais je suis convaincue qu'ils seront boutés hors de France, exceptés ceux qui mourront sur cette terre. »
Jeanne d'Arc à son procès (le 15 mars 1431)
Les enquêteurs, conduits par l'évêque de Beauvais, Mgr Cauchon, ne parviennent pas à établir un chef d'accusation valable : Jeanne semble être une bonne chrétienne, convaincue de sa mission, différente des hérétiques qui pullulent dans un climat de défiance vis-à-vis de l'Église en ces temps troublés. Le tribunal lui reproche par défaut de porter des habits d'homme, d'avoir quitté ses parents sans qu'ils lui aient donné congé, et surtout de s'en remettre systématiquement au jugement de Dieu plutôt qu'à celui de « l'Église militante », c'est-à-dire l'autorité ecclésiastique terrestre. Les juges estiment également que ses « voix », auxquelles elle se réfère constamment, sont en fait inspirées par le démon. L'Université de Paris (Sorbonne), alors à la solde des Bourguignons, rend son avis : Jeanne est coupable d'être schismatique, apostate, menteuse, devineresse, suspecte d'hérésie, errante en la foi, blasphématrice de Dieu et des saints. Jeanne en appelle au pape, ce qui sera ignoré par les juges.
Le 24 mai, au cimetière Saint-Ouen de Rouen, les juges mettent en scène une parodie de bûcher[réf. nécessaire] pour effrayer Jeanne et la presser de reconnaître ses fautes. Jeanne sous la promesse orale (donc invérifiable) du tribunal de l'incarcérer dans une prison ecclésiastique, signe d'une croix (alors qu'elle savait écrire son nom) l'abjuration de ses erreurs, reconnaissant avoir menti à propos des voix et se soumet à l'autorité de l'Église. Elle est alors renvoyée dans sa prison aux mains des Anglais. S'estimant trompée, elle se rétracte deux jours plus tard, endosse de nouveau des habits d'homme (dans des conditions obscures).
Déclarée « relapse » (retombée dans ses erreurs passées), le tribunal la condamne au bûcher et la livre au « bras séculier ».
Le 30 mai 1431, elle est brûlée vive place du Vieux-Marché à Rouen. Elle rend l'âme en criant trois fois « Jésus ». Selon les témoignages, elle est voilée et placée à plus de trois mètres de hauteur.
Le cardinal de Winchester avait insisté pour qu'il ne reste rien de son corps. Il désirait éviter tout culte posthume de la « pucelle ». Il avait donc ordonné trois crémations successives. La première vit mourir Jeanne d'Arc par intoxication au monoxyde de carbone, la seconde laissa au centre du bûcher les organes calcinés, et de la troisième il ne resta que des cendres et des débris osseux qui furent ensuite dispersés par Geoffray Therage, le bourreau, dans la Seine (là où a été construit plus tard le Pont Jeanne-d'Arc) afin qu'on ne puisse pas en faire de reliques.